Depuis 2018, 100% L’EXPO a déjà réuni plus de 300 artistes à La Villette pour le plus grand plaisir d’un public curieux et nombreux. À l’occasion de sa 6e édition, Inès Geoffroy, cheffe de projets et commissaire d’expositions à La Villette, répond à nos questions.
Comment est né ce projet et quelle a été son évolution depuis la première édition ?
L’idée d’ouvrir la Grande Halle de La Villette à de jeunes diplômés est née en 2018 sous la forme d’une invitation à une cinquantaine d’artistes des Beaux-Arts de Paris. Cette première expérience nous a donné envie de nous investir dans la mise en valeur de la jeune création et de travailler à une autre échelle. Dès lors, pour les éditions qui ont suivi, nous avons convié des écoles installées sur tout le territoire, avec l’intention de renforcer nos conditions d’accompagnement et d’accueil des artistes, d’assurer une diversité de profils et de propos, tout en programmant du spectacle vivant en parallèle de l’exposition. En plus de la collaboration avec les écoles, ce dernier volet permet de travailler avec un autre réseau de professionnels et de valoriser un écosystème qui accompagne les artistes après l’école (collectifs, lieux de résidence et festivals).
Au fil des années, une attention accrue a également été portée à la scénographie, avec comme principe structurant d’utiliser uniquement des matériaux de réemploi (cimaises, socles, vitrines) issus de nos précédents événements. Portée par l’établissement, cette initiative a permis de développer une mise en espace spécifique au lieu atypique qu’est la Grande Halle. Sans parcours contraint, elle invite les visiteurs et visiteuses à une déambulation libre, jouant sur l’effet de rencontre avec les œuvres.
Comment se déroule la collaboration avec les écoles partenaires et quels sont les critères de sélection des artistes ?
Le principe de sélectionner des artistes sur les 5 années après leur diplôme est lié à l’importance de cette période pendant laquelle se définissent et se confirment les carrières, tant dans la démarche artistique que dans la possibilité de vivre ou non de sa pratique. Première exposition personnelle, exposition en institution, collaboration en galerie, reconnaissance critique, résidence reconnue, vente d’oeuvre, sont autant d’expériences décisives dans cette période. Entre la galerie et les ateliers auto-gérés, une diversité de trajectoires apparait, mais la question de la rémunération reste prépondérante dans tous les cas, nombre de jeunes artistes ne pouvant pas vivre uniquement de leur pratique.
Avec 100% L’EXPO, nous espérons pouvoir offrir un tremplin professionnel à ces artistes, une mise en avant qui puisse faire avancer leurs carrières et les valoriser auprès d’autres professionnels de l’art (critiques, commissaires d’exposition, institutionnels, galeristes, collectifs artistiques etc.). C’est pourquoi nous développons d’année en année un travail d’accompagnement. La Villette offre un cadre propice à la professionnalisation avec par exemple la mise en place de speed-dating professionnels organisés avec le collectif Diamètrea et de sessions de formation avec l’agence TADA, spécialisée dans l’accompagnement administratif des artistes-auteurs
Quels sont les principaux enjeux auxquels doivent répondre les artistes après la sortie d’école, et quel rôle peut jouer 100% L’EXPO dans leurs parcours ?
L’idée d’ouvrir la Grande Halle de La Villette à de jeunes diplômés est née en 2018 sous la forme d’une invitation à une cinquantaine d’artistes des Beaux-Arts de Paris. Cette première expérience nous a donné envie de nous investir dans la mise en valeur de la jeune création et de travailler à une autre échelle. Dès lors, pour les éditions qui ont suivi, nous avons convié des écoles installées sur tout le territoire, avec l’intention de renforcer nos conditions d’accompagnement et d’accueil des artistes, d’assurer une diversité de profils et de propos, tout en programmant du spectacle vivant en parallèle de l’exposition. En plus de la collaboration avec les écoles, ce dernier volet permet de travailler avec un autre réseau de professionnels et de valoriser un écosystème qui accompagne les artistes après l’école (collectifs, lieux de résidence et festivals).
Au fil des années, une attention accrue a également été portée à la scénographie, avec comme principe structurant d’utiliser uniquement des matériaux de réemploi (cimaises, socles, vitrines) issus de nos précédents événements. Portée par l’établissement, cette initiative a permis de développer une mise en espace spécifique au lieu atypique qu’est la Grande Halle. Sans parcours contraint, elle invite les visiteurs et visiteuses à une déambulation libre, jouant sur l’effet de rencontre avec les œuvres.
En tant que commissaire, que devinez-vous de la manière dont les artistes envisagent temps présent et futur proche ?
Tout artiste s’inscrit dans sa génération et je pense qu’on peut facilement, et à juste titre, dire que la jeunesse est particulièrement inquiète des conjonctures actuelles et des perspectives futures. C’est en regardant les thématiques fortes qui ressortent chaque année dans l’exposition que l’on reconnaît les points de vigilance de cette génération. Sans surprise, la question environnementale est prépondérante, avec des artistes qui souvent imaginent des mondes dystopiques après l’effondrement, pour mieux nous alerter sur notre rapport présent au vivant. Les questions décoloniales sont elles aussi fondamentales, la nouvelle génération prenant à bras le corps ces luttes, non sans pointer du doigt le manque de lucidité et de prise de position des précédentes. Enfin, les questions de minorités de genre sont davantage traitées dans une approche intersectionnelle, avec par exemple la tentative de dépasser une lecture trop universaliste du féminisme.
En parallèle des sujets défendus, on peut également observer depuis plusieurs années un changement dans les projections habituelles de carrières. La recherche de la reconnaissance reste indispensable, car elle permet aux artistes de pouvoir réellement vivre de leur travail. Pourtant, à rebours d’un système ultra-compétitif que continue d’imposer le marché de l’art, voire certaines institutions culturelles, on observe de plus en plus d’initiatives collectives qui cherchent à penser de bonnes pratiques dans le milieu de l’art contemporain. Une grande partie de la nouvelle génération d’artistes et de travailleuses et travailleurs de l’art cherche à ne pas reproduire un système oppressif, excluant, sexiste, raciste et exploitant à de nombreux égards, dans l’espoir d’évoluer sur le long terme dans un milieu plus éthique et transformé de l’intérieur.