En résidence à La Villette, la compagnie Les Enfants Sauvages s'intéresse aux premières formes d'art, et au mythe d'Orphée... comme le premier poète. Il prend vie avec une marionnette sous les traits d'un vieux bonhomme. Le Périphérique a eu la chance de voir naître ce spectacle, Orphée.s.
Parce que la compagnie Enfants Sauvages nous emporte dans un univers poétique, nous questionnant sur ce qu'il se passe à l'intérieur de nous... on en demande encore ! La suite ici d'une belle interview d'Alan Payon restituée à l'écrit.
Pouvez-vous nous parler d’un de vos chocs artistiques ?
J’ai l’impression — et peut-être que c’est cela être marionnettiste — d’être en état de choc permanent. Comme une bille qui rebondit dans le flipper des pratiques artistiques. Le théâtre m’a amené à écrire, écrire à mettre-en-scène. Plus tard, écrire pour la danse m’emmena vers la marionnette, où là, choc ultime, il n’y avait plus aucune limite. Je pouvais m’intéresser tout à la fois au mouvement, à la fabrication, au texte, à l’image.. En marionnette, j’aime les inventeurs, ceux qui proposent véritablement autre chose dans les modes de représentation. Par exemple, le travail d’Ilka Schönbein me fascine depuis l’enfance.
Si vous deviez citer un artiste qui vous a particulièrement inspiré, qui serait-ce, et pourquoi ?
Ce qui m’intéresse le plus, ce ne sont pas forcément les artistes mais leurs idées. Comment ils manipulent une idée, via leur pratique. Je pense notamment à Maison Mère de Phia Ménard qui pour moi est une œuvre magistrale sur l’Europe. Sur nous tous en tant que Société. Il ne se passe rien, mais elle est là, dans toute sa puissance, à construire un temple de carton - c’est génial le carton ! Elle nous fascine, son entreprise est à la fois grandiose et ridicule. Une gageure. Le temps de sa performance, Phia Ménard retraverse toute la construction de notre continent. C’est un spectacle qui agit en moi, à plein de niveaux. Pour moi c’est cela le plus important, les idées qui agissent en nous.
Pouvez-vous nous parler d’un lieu, d’un endroit où vous avez vécu une expérience créatrice particulière ?
Il y en aurait plein ! Mais je suis toujours assez ému en me souvenant de janvier 2019, au fin fond de l'hiver Tchèque, au Théâtre Plum Yard, occupé par une célèbre compagnie de théâtre gestuel. J'y étais pour une résidence en duo avec Alexandre Santiago, le musicien des Enfants Sauvages. J'avais fabriqué un prototype en papier pour avoir des ailes d'au moins 4 mètres d'envergure. Alexandre s'est mis à jouer, et moi à découvrir la matière, le bruit du papier, je me suis mis à inventer un nouveau vocabulaire de mouvement - à véritablement inventer. De ce moment privilégié est sorti une chorégraphie très forte, que nous avons reprise dans notre perfomance Sauroctone.
Dans la culture pop (émission radio, télé, BD, livres…), quelle est votre madeleine de Proust ?
Je ne devrais sans doute pas le dire, mais je suis un grand fan de la série Stargate SG1 qui s'inspire des premières civilisations dans un univers totalement SF (Science-fiction). Avec notre équipe, je dis souvent pour blaguer qu'Orphée.s est un peu mon hommage à cette série... Puisqu'on part de la civilisation hittite puis grecque pour finalement finir sur HR5171, la plus grosse étoile connue dans l'univers observable qui se situe dans la constellation du Centaure. Une coïncidence ? Je ne pense pas...