« Je voulais concevoir un grand chantier chorégraphique. » Némo Flouret - La Villette
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© Martin Argyroglo
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« Je voulais concevoir un grand chantier chorégraphique. »

Némo Flouret réinvente 900 Something Days Spent in the XXth Century en un rituel machinique vibrant, inspiré par le livre d’Aurélien Bellanger.


À la Grande Halle de la Villette, Némo Flouret réinvente 900 Something Days Spent in the XXth Century en un rituel machinique vibrant, inspiré par le livre d’Aurélien Bellanger. Cette pièce chorégraphique, entre énergie et désespoir, explore les vestiges industriels et les infrastructures désaffectées, transformant ces lieux oubliés en terrains de danse. Flouret nous invite à une expérience où la danse se confronte à la réalité postindustrielle, en oscillant entre grandeur et déclin.

L’une des principales sources d’inspiration pour 900 Something days spent in the XXth Century est un livre d’Aurélien Bellanger, Eurodance. C’est un texte fulgurant, composé principalement d’aphorismes et de fragments qui se succèdent à toute vitesse. Qu’est-ce qui, dans cette lecture, a nourri ton travail chorégraphique ?

Il y a effectivement eu au début du projet une lecture importante, celle du livre d’Aurélien Bellanger, qui juxtapose plusieurs phénomènes apparus au tournant du millénaire : la naissance d’une musique nouvelle qu’est l’« Eurodance », les traités européens, les grands chantiers infrastructurels ayant pour objectif d’accélérer les voyages (Eurostar et les lignes à grandes vitesse) mais aussi les particules (Grand collisionneur de Hadron). Ceci dit, même si dans 900 Something days… nous convoquons des symboles et des références directes à ces projets européens, je ne dirais pas que c’est une pièce « à propos » de l’Europe : ce à quoi j’ai surtout été sensible dans le texte de Bellanger, ce sont les lieux qu’il évoque et le rythme de son écriture. J’ai eu envie d’imaginer une « danse d’autoroute » pour des vestiges industriels, des infrastructures désaffectées ou réaménagées, de faire apparaître des corps à des endroits où on n’en voit pas habituellement, de jouer avec ces lieux oubliés. Je voulais concevoir un grand chantier chorégraphique, une sorte de rituel machinique ou logistique qui accélérerait jusqu’à dysfonctionner – ou jusqu’à confiner à une sorte d’illisibilité.

Depuis la fin de tes études à P.A.R.T.S., les projets extrêmement divers dans lesquels tu as été impliqué semblent tous avoir au moins une chose en partage : ils t’ont fait sortir de la boîte noire théâtrale et t’ont amené à la rencontre de lieux autres, qui ne sont pas a priori destinés à la danse. D’où vient cet intérêt, sans cesse renouvelé, pour le travail et l’écriture in situ ?

La notion de chorégraphie in situ ou de « chorégraphie située » traverse en effet pratiquement l’ensemble de mes projets, que ce soit en tant qu’interprète ou chorégraphe. En ce qui concerne 900 Something days…, c’est l’idée-même du spectacle qui est apparue hors du studio de danse, lorsque j’étudiais à P.A.R.T.S. Suite à ma découverte du texte de Bellanger, j’avais invité plusieurs étudiant.e.s. à quelques sessions de recherche : nous travaillions le soir, sur l’aire de chargement des décors située derrière le bâtiment de la compagnie Rosas. Ces sessions étaient difficiles à cause des contraintes du travail en extérieur : chaleur du goudron en plein cagnard, manque de lumière à la nuit tombée, dureté des matériaux ou encore bruits de voie ferrée. Il fallait penser au moindre détail, trouver des solutions concrètes qui, paradoxalement, permettaient de générer du matériel chorégraphique : par exemple, dans 900… les interprètes s’éclairent eux-mêmes, ce qui affecte directement leurs trajectoires dans l’espace.

Propos recueillis par Thomas Bïrzan, juillet 2024

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